12 janvier 2005

 

Un poète moderne

Les poètes sont partis. Ils n'ont plus lieu d'être, dans notre société, dans le quotidien de notre vie pressée. Et pourtant, moi j'en connais un, peut-être le dernier poète du théâtre français. La phrase n'est pas de moi, elle est de Georges Lavaudant à la fin des années 70, c'est ainsi qu'il définissait déjà Bruno Boëglin, auteur, metteur en scène et comédien.


(Bruno Boëglin joue Les Bonnes à la Croix-Rousse)

J'ai connu le travail de Boëglin et de son Novothéâtre en 94, lors de la saison inaugurale du Théâtre de la Croix-Rousse, à Lyon. Dans une pièce intitulée Pan Theodor Mundstock, il partageait la scène avec une poule. Une petite poule, qu'il appelait d'ailleurs "poulette". Et ce personnage de petit juif oublié des nazis dans un ghetto européen, qui se faisait tout petit pour ne pas qu'on le remarque, mais dont on sentait bien qu'il ne tiendrait pas jusqu'à la fin de la guerre et qu'un jour on viendrait frapper à sa porte, ce personnage avait les traits exacts de l'humanité. L'Homme, celui qui pense qu'on l'a oublié, qui vit dans la terreur de la mort, mais qui finit inexorablement par s'y contraindre.

Bruno Boëglin est un petit être, un lutin d'une cinquantaine d'années, malicieux, malingre, maladif. C'est un croisement de Sim, de Popeye et de personnages bien plus délicats.

Je me souviens l'avoir croisé un soir tard au pied des pentes de la Croix-Rousse, un petit sac en plastique à la main. Il sortait de chez un épicier arabe chez qui il avait acheté du vin de table. L'alcool a longtemps été son problème, à Bruno, et sans doute que sans lui, il aurait été plus productif.

Bruno est actuellement à l'affiche de Les Bonnes, de Jean Genet, toujours à la Croix-Rousse, dix ans après Mundstock. Et dix ans après, le même choc, la même émotion, la même souffrance par procuration, de voir Boëglin à nu en face de soi. Un comédien au vécu chaotique dans le rôle de Madame, la patronne des Bonnes, une femme fardée et parfumée, mais dont la noire conscience suscite une haine coriace chez ses subordonnées.

Je me suis acheté une grande bouteille de Mustela, le lait de toilette pour bébés. Le plus cher, le plus luxueux des produits pour nourrissons. Je me suis dit que si c'était bon pour nettoyer la peau des bébés, ça ne ferait pas de mal à la mienne.


(Sans commentaire)

Et le fait est, qu'au terme d'une journée, le coton imprégné de Mustela et passé sur la peau du visage ressort tout noir. La pollution du quotidien. Si seulement on pouvait aussi se nettoyer le cerveau de la pollution qu'on y fait rentrer tout au long de la journée.

Merci, Fufette, de ton message. Ça me rappelle le Canada, à moi aussi, quand tu me laissais tes impressions en direct !
Je n'ai pas de nouvelles de Diane. Elle doit être sur le sol français, à l'heure qu'il est. Peut-être sera-t-elle à Lyon samedi soir pour voir le Petit Prince. De toute façon, elle reste jusqu'à fin janvier, j'aurai le temps de la trimballer chez tout le monde !

Cissane 2005
----

Comments: Enregistrer un commentaire

<< Home

This page is powered by Blogger. Isn't yours?